Découvrez Tour de danse, une série d’articles dans lesquels nous mettons cinq musiciens à l’honneur. Leurs points communs ? Ils créent de la musique de danse ou de la musique qui entraîne à danser et fêtent en 2021 un anniversaire à chiffres ronds.
Ce premier article est dédié à Astor Piazzolla, bandonéoniste de talent et compositeur argentin célèbre pour sa musique de tango. Aujourd’hui, il aurait soufflé ses 100 bougies.
Savez-vous ce qui a déterminé l’invention du tango, genre musical ? Certainement l’intention populaire d’une nouvelle manière de danser. Comme la danse du même nom, le tango naît à Buenos Aires durant la deuxième moitié du 19e siècle. Il mélange plusieurs formes musicales européennes (telles que la valse), de la musique latino-américaine (habanera, milonga) et une rythmique d’origine africaine (le candombe). Au départ, le tango est une musique d’orchestre, majoritairement d’instruments à cordes, mais le piano y prendra vite sa place. Le bandonéon y est intégré à partir de 1908 et devient l’instrument par excellence du genre. Rapidement, le tango sera aussi chanté.
Qui est Astor Piazzolla ? Le jeune Piazzolla fait ses débuts dans l’orchestre d’Aníbal Troilo et suit des cours de composition auprès d’Alberto Ginastera. Au début des années 1950, il pense sérieusement à abandonner le tango pour se consacrer à la musique classique. Il se rend alors à Paris et étudie l’art du quatuor à cordes auprès de Nadia Boulanger. Cependant, il peine à trouver un style musical personnel. Après avoir écouté l’une de ses compositions, la pédagogue et compositrice française le persuade d’utiliser les musiques populaires. Mais pas que cela ! Il faut qu’il les enrichisse d’un langage évolué et contemporain. C’est le déclic !
Grâce à son génie, Astor Piazzolla réussi à révolutionner les formes et les couleurs du tango traditionnel argentin. Il crée ce qui deviendra plus tard le nuevo tango. Quels sont les éléments fondamentaux qui ont inspirés Piazzolla ? Le langage rythmique, l’esprit fortement dramatique et passionné, les couleurs vives. Ses compositions sont « presque » classiques en termes de structure et d’élaboration. Mais elles vont s’éloigner de la tradition. Comment ? En intégrant des éléments musicaux innovants tels que les outils expressifs de la musique jazz, la dissonance, le chromatisme.
Piazzolla, rénovateur, introduit également dans sa musique des instruments qui n’étaient pas utilisés dans le tango traditionnel : l’orgue Hammond, la flûte, le marimba, la basse et la guitare électrique, la batterie et les percussions. Avec cet ensemble d’instruments, intégré aux instruments à cordes, en mai 1974, il sort Libertango, l’un de ses disques les plus connus.
Comment ont réagi les puristes du genre ? Avec de vives critiques, bien évidemment. Ils l’ont même défini « el asesino del tango » (le tueur du tango). Mais ils n’ont pas compris qu’en réalité l’art de Piazzolla plaçait définitivement le tango au-delà du temps et de l’espace. Il offrait une dimension cultivée et absolument noble à cette tradition.
3’000 est le nombre estimé de compositions écrites par le compositeur argentin. 500 le nombre des pièces enregistrées. Sa vaste production comprend des œuvres pour orchestre, pour guitare solo et diverses autres compositions. Plusieurs sont encore aujourd’hui des classiques du tango pour le public argentin, comme Balada para un loco et Adiós Nonino, dédié à son père, à l’occasion de sa mort.
Aujourd’hui, Piazzolla est considéré comme l’un des plus grands compositeurs du 20e siècle. Il jouit d’une estime et d’une renommée dans le monde entier. Ses compositions sont interprétées par de grands orchestres et de célèbres musiciens classiques, ainsi que par de nombreux jazzmen. Tout au long de sa carrière, Astor Piazzolla fonde et dirige de nombreuses formations (orchestre, quintette, octuor, nonette) en choisissant lui-même ses musiciens, dont certains sont proches du jazz. Il est un bandonéoniste extraordinaire et un chef de groupe des plus inspirés. Avec son travail, le musicien argentin a montré que le tango peut être une expression éternelle de l’esprit humain.
En 2008, la Présidente de la République argentine, Cristina Fernández de Kirchner, a nommé l’aéroport international de Mar del Plata, sa ville natale, en l’honneur d’Astor Piazzolla.
A voir et entendre :
- Sur Medici.tv (accessible sur les postes publics de la BCUL ou à distance par crypto pour les membres de l’UNIL) : Hommage à Astor Piazzolla. À travers interviews et extraits de concerts, ce film de Christopher Nupen – documentaliste spécialiste de musique – dresse un portrait d’une figure dynamique qui a parfaitement su entremêler improvisation, interprétation et composition (en anglais).
- Astor Piazzolla, le symbole du tango argentin sur le plateau de l’émission « Mosaïque » en 1977 (RTS).
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