Lorsqu’un document interpelle, bouscule, amuse, transporte ou transforme, nos bibliothécaires aiment le partager avec vous. Ce partage se fait à travers les « Bouche-à-oreilles », des signets placés dans les documents disponibles dans nos différents sites.
Nous en avons sélectionné quelques-uns ci-dessous pour vous donner envie.
Livres
Nucléus, ce qui reste quand il n’y a plus rien
Zinaïda Polimenova
L’archive est une matière féconde, pouvant apporter ivresse et vertige à qui sait la manipuler. Dans ce roman bulgare, la découverte par l’écrivaine de photographies anonymes documentant un voyage d’entreprise de Sofia jusqu’en RDA est le point de départ de cette fiction du réel. Entre surveillance quotidienne, travail à l’usine sous l’ère du communisme et mouroirs masqués en camps de travail, la Bulgarie en pleine guerre froide nous apparaît sous l’oeil délicat de Zinaïda Polimenova. Enfin, comme toujours les éditions du Chemin de fer nous offre un travail soigné et original, tant sur la typographie que le design de ce bel objet.
Chloé, site Riponne
Le poids du papillon
Nathalie Nicolet-dit-Félix
La fin de vie d’un père, l’accompagnement de ses derniers souffles au son de la voix de sa fille, ces quelques instants à travers lesquels vont passer toute une vie de bons ou de moins bons moments pour finir dans la complicité.
Un joli texte tout en douceur qu’on a envie de recommencer dès qu’on arrive au bout pour le relire avec les éclairages amenés au fil du texte. C’est hors du temps, ça pousse à l’introspection, c’est délicat.
Christophe, site Riponne
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Envolée
Marcelline Delbecq
Ce livre est presque un objet d’art. J’ai une passion pour ces petits bijoux que sont les livres de la collection Fléchettes des éditions Sun-Sun, à la fois précieux et humbles. D’abord, le format, unique, comme un trésor entre les mains. Ensuite, la couverture, percée de petits orifices, constellation qui s’ouvre à vous, plongée dans une membrane, dans un hors-champ poétique. Puis vient l’image, un autochrome, délicatement apposé dans les plis de la page. Comme un lit, un écrin pour l’image. Car l’image parle, elle nous dit quelque chose à travers le temps. Sa chair nous enveloppe et le vertige opère. C’est ce que nous raconte l’autrice qui recherche les traces d’une femme à travers les dispositives du philanthrope Albert Kahn. Puissance de l’archive, pulsion d’archive nous dirait Derrida. Alors, belle traversée à vous !
Chloé, site Riponne
Humus
Gaspard Koenig
Pourquoi lire « Humus » roman réaliste ? Pour moi il s’agit du Livre de la décennie. Comme « les Misérables » ou « Illusions perdues » ont marqué la littérature.
Ce roman met les problématiques de l’agriculture, de la qualité des sols et de l’écologie au centre avec beaucoup d’ironie. Un roman qui démocratise la question de l’appauvrissement des sols et de la disparition de la biodiversité par la prise de conscience de deux étudiants en agronomie, issus de deux milieux bien différents, Arthur le fils de bourgeois, et Kevin le fils d’ouvriers agricole, qui vont faire en sorte de changer le monde.
Couronné de deux prix littéraires en 2023 (Interallié et Jean Giono). Ne passez pas à côté !
Evelyne, site Riponne
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La reine des enfers
Bea Fitzgerald
Une très belle réécriture du mythe de Perséphone (ou Corée), une héroïne forte et inspirante.
J’ai habituellement un peu de peine à accrocher aux récits ultra féministes, où les personnages féminins sont badasses et toutes puissantes, sans cohérence particulière, juste par ce que ce sont des femmes. Mais ici, cela fonctionne très bien. De même que l’interprétation du personnage d’Hadès, tout en sensibilité et en finesse, le rend très touchant. Le tandem que le Dieu des enfers forme avec Perséphone fonctionne très bien.
Dévoré en 3 jours, je recommande !
Amélie, site Riponne
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Les leçons de la crise syrienne
Fabrice Balanche
Si le narratif médiatique qui court en occident sur l’évolution du monde arabe depuis 2011 vous semble surfait, ou pire, si vous le trouvez ennuyeux et répétitif, précipitez-vous sur le dernier livre de Fabrice Balanche. Bien écrit, l’ouvrage bénéficie du déroulement logique de la pensée de l’auteur, qui connaît très bien son sujet, labourant le terrain proche-oriental depuis les années 1990.
Il y insiste sur les ressorts de la guerre civile syrienne qui, bien au-delà du seul Printemps arabe, puise ses causes dans la crise démographique et économique du pays. Double crise qui ne fait que commencer dans toute la région, avec des risques de déstabilisations future qu’il ne faut pas sous-estimer. Du même auteur, « La région alaouite et le pouvoir syrien » permet d’approfondir le sujet sur le long terme historique, à partir de situations concrètes.
Laurent, site Riponne
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The Man Who Could Move Clouds : A Memoir
Ingrid Rojas Contreras
The story of Ingrid Rojas Contreras and her ancestors is laced with magic, legends and ghosts in the most fascinating way. Her grandfather was a renowned curandero, a healer, who would perform readings, create ointments, heal people through their dreams and move clouds. Her mother became the first curandera of her family after she fell down a well, temporarily lost her memory and earned the power of seeing ghosts. When she was 8 years old, Ingrid also lost her memory for a while after an accident. She didn’t get the gift of a magical power, but she has basked in that enchanted atmosphere since her birth.
In this beautifully written memoir, she tells her story, the story of her family, but also that of the native peoples of Colombia and the violent impact that colonialism had and still has on them today.
Melina, site Riponne
Le carton de mon père : réflexions sur l’héritage
Lukas Bärfuss
Pour certains d’entre nous, la question de l’héritage, qu’il soit matériel ou psychologique, demeure une question brûlante. Entre recherche, acceptation ou rejet, un éventail d’interrogations peuvent se poser concernant la filiation. Devons-nous nécessairement être le fils de quelqu’un ? Et que faire des traces du passé quand nous nous sommes appliqués à le dépasser ?
Avec intelligence, Lukas Bärfuss soulève des problématiques à travers son vécu personnel, traçant de manière savante mais jamais indigeste une histoire de la science des origines et une anthropologie de la famille. D’un carton de bananes empli de dettes du père défunt et oublié, l’auteur nous mène pudiquement à s’interroger sur la si complexe et parfois douloureuse parenté. Un ouvrage infiniment lumineux.
Chloé, site Riponne
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La pouponnière de Himmler
Caroline de Mulder
Plongée dans l’intimité d’une pouponnière nazie. Rien que ces trois mots suffisent à vous faire frissonner d’un plaisir à la fois voyeuriste et historique. La fiction du réel opère, et se tisse alors de biens étranges liens entre le destin d’une jeune française enceinte d’un soldat allemand et accueillie dans cette curieuse usine à vocation aryenne, et une secrétaire nazie obsédée par l’ordre, l’hygiène et sa fidélité au Parti. Trois cents pages qui caressent en douceur un pan de notre Histoire à travers bébé, pour nous rappeler ce théâtre tragi-comique que peut être la vie. On tâchera également de se souvenir combien le corps de la femme a pu être instrument de guerre et outil d’aliénation d’une société patriarcale. Une réalité loin d’être dystopique aujourd’hui encore dans certains pays de notre beau monde.
Chloé, site Riponne
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Kurtz
Michaël Matthys
Adaptation très libre du roman « Au cœur des ténèbres » de Joseph Conrad, ce récit graphique est un véritable ovni. Aux qualités picturales indéniables et à l’ambiance très noise, l’univers horrifique de l’histoire coloniale apparaît et disparaît dans les lambeaux de peinture au sang de bœuf pour mieux hanter notre mémoire. Les pages mêmes de l’ouvrage sont chargées d’une vibration particulière, matière tant mentale que sonore. Surprenantes sont les quelques phrases jalonnant l’œuvre, comme des cris perçant les pages depuis le brouillard de l’indicible. Peut-être que, comme moi, votre rétine finira par s’abandonner dans les visages sans traits et paysages sans contours de cette œuvre à la fois terriblement attirante et repoussante d’où jaillit une innommable boue. Une expérience (presque immersive !) réservée aux âmes les plus téméraires…
Chloé, site Riponne
Films
La nuit du 12
Dominik Moll
Dès les premières minutes on connait l’issue, l’enquête demeure irrésolue. Pourtant, cela n’empêche pas de rester captivé du début à la fin.
Inspiré d’un fait réel, ce film raconte l’enquête de la police judiciaire de Grenoble sur la mort effroyable de Clara, jeune femme brûlée vive un soir alors qu’elle rentre chez elle d’une soirée chez sa meilleure amie. Plus qu’un simple polar, “la Nuit du 12” évite tout sensationnalisme et reste au plus proche de la nature humaine et de l’impact d’un tel évènement. Sans approche accusatrice, il offre une réflexion sur les violences faites aux femmes et la façon dont les féminicides sont pris en charge dans un système judiciaire composé majoritairement d’hommes. C’est un film percutant, envoûtant, une œuvre réfléchie qui persiste dans l’esprit au-delà du générique.
Lea, site Riponne
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